Musicman Publié 5 Juillet 2016 Partager Publié 5 Juillet 2016 Mercredi pm. Au bureau. Je décide d'aller rider dans la ZEC Rivière Blanche, 90 km au nord de Québec. J'informe mon patron que je prends congé. Il est jaloux. Jeudi matin tôt. J'emprunte la 138 vers Neuville. Je monte ensuite au nord vers Rivière-à-Pierre. Y'a personne. La route m'appartient. Un plein d'essence à St-Raymond. Environ 3$. Avec les 8 litres dans le réservoir je ferai 237 km de chemins forestiers. J'ai aussi un bidon de 5L, au cas où l'aventure m’appellerait davantage. 10:00. J'arrive à l'entrée de la ZEC. Je paye 47$ pour deux droits de passage, deux nuits et une carte. Après le placotage d'usage avec la préposée, j'enfourche mes 16 chevaux direction nord sur la 2 et ensuite la 29. Dans les premières courbes, je fais un dérapage non sollicité. Pas de casse. Mes pneus sont trop durs et je roule trop vite. 15 psi et 50 km/hr devraient faire l'affaire. Je suis seul. C'est pas l'temps de me casser un poignet ou une clavicule. C'est pas parce que j'ai une balise de détresse que je suis en totale sécurité. Je dépasse en toute simplicité une grosse GS. J'espionne le pilote dans mon rétroviseur. Je stoppe un peu partout, sans trop m'attarder. Je ne veux pas arriver trop tard au camping du Lac Batiscan. Je prends le chemin secondaire qui descente jusqu'au camping. C'est plaisant. Les courbes sont en terre battue, ou presque. 65 km/hr. En arrivant au camping je débute sans tarder ma mission: trouver le vieux chemin qui longe le lac vers le sud-est et qui devrait aboutir sur la #7 qui traverse la Zec Batiscan Nielson. Déception. Il est bien là, mais la forêt a repris sa place, sans demander la permission. Après une inspection méthodique du camping, je ne trouve pas d'arbre pour tendre mon hamac. C'est ironique, chu en pleine forêt. J'installe donc tout mon attirail sous l'abri commun. C'est confo. Je siffle une Boréal IPA refroidie dans de l'eau de source. C'est bien meilleur avec de l'eau de source, tout l'monde sait ça. J'ai faim. J'allume mon Trangia. J'ai une recette hyper facile qui ne salit pas les chaudrons: de l'eau et un sac de ramen. Une poche de purée de fruits comme dessert. Chu un gars simple. J'ai encore faim. Pour éloigner d'éventuels oursons, ainsi que leurs mères, j'allume un feu. Je relaxe sur ma chaise pliante. Je pense à mes vieux pêchés, ainsi qu'à ceux que je n'ai pas faits. Je scrute la carte de la Zec. Y'a du choix. C'est l'heure de faire dodo. Je ne distingue plus les couleurs. Je rentre dans mon hamac. Me semble qu'il fait anormalement froid. J'enfile mon duvet. Quelques heures plus tard je me retrouve devant le feu. Je le recharge avec quelques rondins de résineux. Chaleur. Je reste devant, debout, sans bouger, comme mystifié. La nuit sera longue. J'apprendrai plus tard que le mercure est tombé à -2C. Le soleil commence à toucher l'abri. Je sors misérablement de ma torpeur. J'enfile mon anorka cadpat et je tourne le dos au soleil. Je deviens un panneau solaire vivant qui apprécie chaque petit watt capté. J'ai hâte d'ouvrir ma canne de beans. Mais avant, faut exécuter le protocole prévu par la convention de Genève: le café. Tout mon stock est rangé. Mon bike est gréé. C'est un départ. Je remonte la pente et emprunte le premier sentier secondaire sur ma gauche. Ça monte encore. Sentier abrupt lavé par la pluie. Un pierrier. Je passe en 1ère, je me lève sur les pegs et je négocie. Satisfaction. Plus tard, une boule noire traverse le sentier en un éclair. Merde! Un ourson ! Je stoppe. Je joue du klaxon. Je rince le moteur. J’attends. Je ne bouge pas. Rien. Pas de grognement. Pas de boule noire plus grosse. Je rebrousse chemin. De toutes façons, j’avais plus envie d’aller par là. Je redescends vers le chemin principal. Je file vers le nord, destination Chute de la Rivière aux Éclairs. Je passe tout droit. Je fais un U-turn en dérapant, comme un gamin. Le sentier qui mène à la chute est étroit, rocailleux et se termine en cul-de-sac juste après une courbe. Je freine à temps (pas vraiment, j'ai passé proche de me casser la gueule). La chute est superbe. J'emprunte un chemin secondaire. C'est barré par une belle grosse épinette probablement tombée durant l'hiver. Je sors ma scie jack-knife Fiskar. Je l'ai toujours en forêt, été comme hiver. J'aime avoir de bons outils. Je continue encore plus vers le nord jusqu'à la fourche pour se rendre à La Tuque. Je zoom-out sur mon GPS. Chu à la même latitude que La Tuque. Je n’aurais jamais pensé être aussi haut dans l'arrière pays. Je vire de bord. Je file maintenant vers le sud. J'ai entendu parlé du camping du Lac Bellevue situé dans la Réserve de Portneuf. Je fais un tour du propriétaire. Je confirme, c'est super. Pas étonnant, c'est un parc provincial de la nation québécoise. Ça fera un super camp de base pour continuer mes explorations futures. Sur le chemin du retour, je jette un coup d'oeil un peu trop longtemps sur mon GPS et...BANG! Je fonce tête baissée dans un trou plus large que ma roue avant. Mais j'ai un char d'assaut, y'a pas de casse. Avec ma GSX ça ce serait très mal terminé. Plus tard, je prends une pause. Forte odeur d'essence. Mon bidon de 5L est fondu sur le silencieux. Ça dégoute. Je transvide ce qui reste. J'ai appris un truc de plus: dès que ça cogne dure, on stoppe immédiatement et on fait une inspection. Je croise un gars avec sa V-Strom et une dame avec une grosse GS. Ajustement de pression dans les pneus. On fraternise un brin. Chu fatigué, j'oublie d'enlever mon casque. Quand j'y repense, c'est pas très poli. Ils arrivent de Montréal et couchent au camping Miguick. Je leur raconte que je me suis perdu au beau milieu du chemin, pendant quelques secondes, le temps que la poussière de deux pickups retombe. Je me suis retrouvé dans une série d'ornières hautes et moles. La dame, qui elle non plus n'a pas enlevé son casque, ne bouge plus. Ça doit avoir un lien avec le fait que sa GS semble toute neuve. On se souhaite mutuellement bonne route. J'arrive à la maison y'est passé 20:O0. J'ai décidé de ne pas passer la deuxième nuit en forêt. Chu trop brûlé. Ma nuit à -2C m'a un peu trop taxé. Moi qui a fait plusieurs expéditions hivernales, dont les Mont Groulx à -45C sous la tente, je me questionne. Est-ce que je commence à devenir une moumoune? La réponse commence à être "oui, des fois". Le lendemain, j'ai un party pour le 50ième d'un ami. Il m'avoue qu'il commence à devenir moumoune, des fois. Je cale mon verre de scotch, rassuré. 25 Link to comment Partager sur d'autres sites More sharing options...
Ann690 Publié 5 Juillet 2016 Partager Publié 5 Juillet 2016 Merci ! Quel beau ride report ! Hum....devenir moumoune.....J'adore ! Link to comment Partager sur d'autres sites More sharing options...
Lonewolf Publié 5 Juillet 2016 Partager Publié 5 Juillet 2016 Bravo , beau RR . Belles réflexions ! Y a des jours ( ou parties ) où on l'est un peu moumounne , puis on se resaisit , et la vie continue . Link to comment Partager sur d'autres sites More sharing options...
carbu Publié 5 Juillet 2016 Partager Publié 5 Juillet 2016 Je ne dirais pas moumoune mais plus conscient de nos limites, lesquelles sont plus facile atteindre avec l'âge. 1 Link to comment Partager sur d'autres sites More sharing options...
cardam Publié 5 Juillet 2016 Partager Publié 5 Juillet 2016 Wow ,belle ride ,bonne photos. Link to comment Partager sur d'autres sites More sharing options...
Clev Publié 5 Juillet 2016 Partager Publié 5 Juillet 2016 Vaut mieux être une moumoune vivante qu'un tough sur une civière ... Link to comment Partager sur d'autres sites More sharing options...
Tartiflette Publié 6 Juillet 2016 Partager Publié 6 Juillet 2016 Très cool à lire ce matin, malgré que je sois dans le train, en direction pour le bureau. Tiens, ton RR me rappelle une chanson des Frères à Ch'val... Link to comment Partager sur d'autres sites More sharing options...
Kenworth Publié 6 Juillet 2016 Partager Publié 6 Juillet 2016 on a fait riviere a pierre la tuque la semaine passer,aller retour c'est vraiment un beau coin. Link to comment Partager sur d'autres sites More sharing options...
Musicman Publié 6 Juillet 2016 Auteur Partager Publié 6 Juillet 2016 Tartiflette, de quelle chanson il s'agit? 1 Link to comment Partager sur d'autres sites More sharing options...
Tartiflette Publié 6 Juillet 2016 Partager Publié 6 Juillet 2016 Tartiflette, de quelle chanson il s'agit? De mémoire, c'est Prends ça cool. J'me suis réveillé un matin Dans l'but d'aller travailler J'ai pris complètement un autre ch'min J'ai décidé d'continuer J'ai suivi mon instinct... 1 Link to comment Partager sur d'autres sites More sharing options...
Musicman Publié 6 Juillet 2016 Auteur Partager Publié 6 Juillet 2016 Ouai! Et je relance les dés avec une citation de Paul Nizan. Je l'ai sur mon bureau. C'est souvent l'amorce de réflexions sur l'impact que nous avons sur notre futur. "Les événements ne viennent pas à domicile, les événements ne sont pas un service public comme le gaz et l’eau. Mais il y a des routes, des ports, des gares, d’autres pays que le chenil quotidien : il suffit un jour de ne pas descendre à sa station de métro." 1 Link to comment Partager sur d'autres sites More sharing options...
jflecours Publié 6 Juillet 2016 Partager Publié 6 Juillet 2016 Très cool à lire ce matin, malgré que je sois dans le train, en direction pour le travail T'as pus de moto?????? Link to comment Partager sur d'autres sites More sharing options...
Tartiflette Publié 6 Juillet 2016 Partager Publié 6 Juillet 2016 T'as pus de moto?????? Oui oui, mais le trafic ici est juste débile. En revanche, je vais visiter mes chantiers en moto... 1 Link to comment Partager sur d'autres sites More sharing options...
Recommended Posts
Créez un nouveau compte ou connectez-vous pour commenter
You need to be a member in order to leave a comment
Create an account
Inscrivez-vous pour un nouveau compte dans notre communauté. C'est facile!
Register a new accountConnexion
Vous avez déjà un compte? Connectez vous ici.
Connexion immédiate